Table ronde : Est-Ouest, Nord-Sud...La liberté de l'enseignement supérieur et de la recherche : un défi trop ambitieux de notre temps ?

Événement passé
24 novembre 2022
12h30

L’exercice de la liberté de conduire des recherches, d’enseigner, ou encore d’étudier conduit parfois à la prison et à l’exil.

C’est ainsi que l’anthropologue Fariba Adelkhah est emprisonnée en Iran depuis le mois de juin 2019. C’est ainsi que la sociologue Pinar Selek, après un premier emprisonnement, a dû s’exiler en France pour éviter l’acharnement du pouvoir turc. C’est ainsi que l’université European Humanities University a dû se réfugier en Lituanie en 2004 pour poursuivre ses activités malgré la pression politique exercée sur elle par le pouvoir biélorusse.

Que recouvrent les « libertés académiques » auxquels se réfèrent les défenseurs de l’indépendance de pensée et d’expression du monde universitaire ? Ces « libertés académiques » sont-elles universelles, opposables dans les différents pays du monde ? Ou bien les divers gouvernements, Etats, entreprises, fondations privées, sont-ils fondés à revendiquer le contrôle sur ces établissements qu’ils financent et dont ils accréditent les diplômes ?

Certes, les libertés académiques sont reconnues et définies par la Déclaration de l’UNESCO, donc par une organisation rassemblant tous les pays du monde (193 Etats membres et 11 membres associés, chiffres 2022), comme suit : « la liberté d'enseignement et de discussion en dehors de toute contrainte doctrinale, la liberté d'effectuer des recherches et d'en diffuser et publier les résultats, le droit d'exprimer librement leur opinion sur l'établissement ou le système au sein duquel ils travaillent, le droit de ne pas être soumis à la censure institutionnelle et celui de participer librement aux activités d'organisations professionnelles ou d'organisations académiques représentatives. ».

Si elle nous renseigne sur l’existence d’un mouvement transnational favorable aux libertés académiques, cette déclaration n’empêche pas les pouvoirs politiques, administratifs, religieux, économiques, publics ou privés, de tenter de prendre le contrôle sur le savoir académique, sa fabrique et son enseignement. Cette volonté de contrôle n’est pas l’apanage des systèmes autoritaires : certaines études analysent la façon dont les sociétés libérales contemporaines gouvernent la science par sa budgétisation et par son indexation sur un impératif de performance à court terme.

Comment, dès lors, s’assurer que savoir et pouvoir s’équilibrent ? Car l’interaction entre savoir et pouvoir est nécessaire – puisque le savoir n’existe pas en vase clos, mais bien dans un environnement politique, économique et social donné- et toujours renégociée.

Par le dialogue entre les expériences iranienne, biélorusse, lituanienne, turque, française, cette rencontre permettra d’aller au-delà des raccourcis et des manichéismes pour tenter de dégager les configurations qui, concrètement, permettent le renforcement de l’indépendance de la pensée dans l’univers académique.